La Maison Forte

Un trou dans l’histoire, pour un futur à inventer ensemble.

La découverte d'un batiment sous-terrain comme une alerte sur ce qui vient.


Et si notre avenir commun résidait dans les trous de l’histoire ?

Voici le récit de la découverte d’un trou monumental où l’on comprend que l’eau a, de tout temps, façonné notre espace de vie et nos paysages. Ce mois de novembre 2022, nous venons en effet de mettre au jour un ouvrage d’art exceptionnel en Aquitaine, une pièce d’eau monumentale, un vivier qui a sans doute joué son rôle dans l’histoire du pays de Serres. Cette découverte nous fait plonger dans un passé oublié et nous incite à y puiser nos inspirations, nos perspectives d’avenir. Pour réhabiliter cet ouvrage ancien, acteur essentiel de la ruralité et de sa biodiversité, nous souhaitons agir dans une dynamique contemporaine de coopération, de formation, de transmission, d’insertion et de création.


L’eau, notre avenir et notre histoire rurale.

Le château de Monbalen est niché au cœur du Pays de Serre, en Lot-et-Garonne. Dès son origine - autour du XIIIème siècle -, il participe à la protection d’une ressource précieuse, l’eau. Il s’agit ici des sources qui alimentent la Masse d’Agen, rivière affluent de la Garonne, et permettent ainsi le fonctionnement des moulins, le développement agricole du territoire et donc la survie de ses habitants.

Durant neuf siècles, ce château a vu les paysages alentours évoluer au gré des urgences alimentaires, des modes et de l’économie agricoles – aujourd’hui, le climat, à son tour, impacte fortement cet environnement. Là, des hommes se sont battus dans des guerres de territoire ou de religion. Ce château est porteur d’une histoire de la ruralité en Aquitaine souvent oubliée, car moins documentée et moins transmise. Une absence de récit sur laquelle il est difficile de construire un avenir durable.

Nous travaillons ainsi à mettre au jour une histoire évaporée : au fil des années, les livres de comptes, les croquis, les journaux de bords qui renseignaient l’actualité sociale et architecturale du château ont disparus.


Face à l’éco-anxiété : métamorphoser ce qui vient.

En 2017, la SCI La Maison forte, rachète le domaine du château de Monbalen et confie à l’association La Maison forte, le soin de transformer le site en « fabrique coopérative des transitions ». Après quelques années d’accueil, de recherches, de résidences et d’expérimentations, nous explorons la notion de « métamorphose » posée par le philosophe Edgar Morin.

Pour modifier notre rapport à un environnement en danger, plusieurs options s’offrent à nous : nous pouvons choisir de miser sur des technologies à venir, des solutions « clé en main » dont on ne maitrise guère la complexité et les effets de bords ; mais nous pouvons aussi chercher à mieux comprendre d’où nous venons, quelle est notre mémoire collective pour inventer un avenir autrement, faire différemment lien social, dans une histoire commune. Alors, comme la chenille, revenons sur nous-même pour préparer et prendre notre envol, différemment, dans un rapport de respect au vivant, aux paysages et à l’histoire des femmes et des hommes qui ont fait ce lieu de vie.

A l’issue d’une première phase d’étude historique et archéologique, nous racontons aujourd’hui l’histoire de ce château sous la forme d’un roman sonore à écouter en marchant : « Etats supposés ». Par ailleurs, le domaine fait actuellement l’objet d’un processus d’inscription patrimoniale. Situé dans un paysage agricole classé comme remarquable, la source et l’eau sont au cœur de son histoire… et de notre avenir.


Un monument oublié, d’une actualité pourtant essentielle.

Au cœur de ce domaine de 6 hectares, nous savions l’existence d’un vivier alimenté par les sources. Des actes notariés du XIXème siècle y font référence et indiquent même l’usage commun de ce bassin pour les gens du village. Si les plus anciens nous parlaient de ce vivier, personne ne l’avait réellement vu en usage. Non entretenu depuis près de cent ans, il était enseveli sous les herbes hautes et la vase.

Souhaitant réinvestir le domaine sous la forme d’un jardin remarquable sauvage et vivrier, désirant faire de ce riche écosystème un espace social et pédagogique dédié à la découverte et à l’entretien des écosystèmes, nous avons entrepris de le vider des milliers de mètres cubes de vase qui le remplissaient depuis des décennies, un chantier auquel nous nous sommes attelés au mois de novembre 2022.

Après une semaine de travaux et plus de 1800 tonnes de vase évacuées nous découvrons, en contrebas du château, un « bâtiment » d’une ampleur insoupçonnée. Ce trou, ce bassin se révèle sous la forme d’un ouvrage d’art inattendu, témoignant d’une attention et d’un savoir-faire hydraulique surprenant. Bâti en pierre, mesurant 53 m de long, sur 9 m de large et 2 m de profondeur, ce vivier est peut-être l’un des plus grands ouvrages de ce type en Aquitaine, certainement du Lot-et-garonne. Sa datation reste à préciser : XVème ? XVIIIème ?  mais tout porte aujourd'hui à croire que cet ouvrage s'inscrit dans le cadre de la reconstruction du château soit la fin du XVème, début duu XVIème.


Une formidable aventure à construire ensemble : faire lien social autour du vivant.

Le futur de cette découverte ? Faire de cet ouvrage rare le pivot, l’axe d’un projet agro-environnemental partagé et dédié à la transmission d’une culture du vivant.

Analyse précise de l’ouvrage, colmatage des différentes fuites présentes dans les sources et les chemins de circulation de l’eau, sécurisation des murs d’enceinte du bassin… nous souhaitons mettre rapidement en œuvre cette première phase de travaux pour ré-ouvrir bientôt cet équipement.

Puis, prendre le temps nécessaire pour le restaurer dans les règles de l’art et réinventer un usage pertinent et innovant pour ce siècle à venir.


Protection d’une ressource désormais rare, l’eau, apprentissage et transmission du respect des écosystèmes, chantiers de formation et d’insertion… Ce chantier participatif permettra d’explorer d’autres façons d’associer mémoire de la ruralité, agriculture, innovation, lien social.

À partir de cet ouvrage du patrimoine, nous travaillerions à réinventer un commun autour des mémoires de nos paysages.


Et si ce trou dans l’histoire abritait notre avenir ?

Voici l’aventure que nous vous invitons à partager.